Le général soudanais Abdel Fattah al-Burhan a annoncé la dissolution des autorités de transition et déclaré l'état d'urgence, lundi 25 octobre 2021. La communauté internationale craint un coup d'État militaire et multiplie les appels au dialogue.
De nombreux partisans d'une transition civile ont manifesté hier dans la capitale Khartoum contre ce qu'ils considèrent tous comme un coup d'État militaire. Tôt dans la matinée du lundi 25 octobre, des hommes armés ont enlevé plusieurs dirigeants et hauts fonctionnaires du pays. Ces arrestations interviennent après des semaines de tension entre les autorités civiles de transition et les militaires. Vers midi aujourd'hui, le général Abdel Fattah al-Burhan a annoncé la dissolution des autorités de transition et déclaré l'état d'urgence. La connexion Internet a été coupée et le pays est à nouveau plongé dans la crise. A l'international, les réactions se multiplient, chacune appelant au dialogue et au respect des clauses établies en 2019 après le renversement d'Omar el-Béchir.
Une trahison
Alors qu'une délégation de l'Union européenne devait se rendre mardi à Khartoum pour discuter avec les acteurs civils et militaires, le haut représentant pour les affaires étrangères Josep Borell évoque une "trahison". Une trahison "de la révolution, de la transition et des attentes légitimes du peuple soudanais". La Commission européenne demande "d'urgence" le rétablissement de tous les moyens de communication pour "permettre d'atteindre ceux qui en ont besoin". Elle ajoute que "toute violence et toute effusion de sang" doivent être évitées. Le président français a appelé au "respect de l'intégrité du Premier ministre et des responsables civils" qui ont été enlevés lundi matin.
Des organisations internationales "indignées
L'une des premières réactions à cette crise est sans doute celle du Secrétaire général de l'ONU. Antonio Guterres a appelé à la libération "immédiate" du Premier ministre Abdallah Hamdok. Il a également condamné ce qu'il considère comme un "coup d'État militaire en cours". Dans un communiqué, le président de la Commission de l'Union africaine a exprimé sa "profonde consternation" et "appelle à la reprise immédiate des consultations entre civils et militaires", rapporte Noé Hochet-Bodin (correspondant de RFI à Addis Abeba). Moussa Faki Mahamat "réaffirme que la voie du dialogue et du consensus est la seule voie pertinente pour sauver le pays et sa transition démocratique". Et il "appelle à la libération de tous les dirigeants politiques arrêtés et au nécessaire strict respect des droits de l'homme". La Ligue arabe appelle à son tour "toutes les parties à respecter l'accord de partage du pouvoir transitoire établi en 2019 après le renversement d'Omar el-Béchir".
Sanctions américaines
Lors d'une visite à Khartoum avant l'instauration de l'état d'urgence, l'envoyé spécial américain pour la Corne de l'Afrique avait prévenu que "tout changement par la force du gouvernement de transition mettrait en péril l'aide américaine". Ces menaces ont été mises à exécution hier, puisque le Département d'Etat a annoncé la suspension de 700 millions de dollars d'aide américaine pour soutenir la transition démocratique.
Le département d'État américain exige la libération des responsables civils emprisonnés, dont le premier ministre Abdullah Hamdok, et la non-violence des militaires contre les manifestants pacifiques. Le Conseil de sécurité de l'ONU se réunira cet après-midi, une réunion au cours de laquelle le problème soudanais sera abordé.
Aretha OYOA