Société

Céréales ukrainiennes : Les espoirs Africains douchés après le bombardement d'Odessa

Céréales ukrainiennes : Les espoirs Africains douchés après le bombardement d'Odessa

Au lendemain du bombardement russe du port d'Odessa samedi, l'accord conclu la veille entre l'Ukraine et la Russie, et prévoyant des couloirs sécurisés pour exporter par la mer Noire 20 à 25 millions de tonnes de céréales ukrainiennes, est fragilisé et à la limite caduc.


Un soulagement de courte durée pour l’Afrique. Elle, qui souffre rudement du manque de céréales depuis le début de la guerre en Ukraine, voit ses espoirs douchés après la frappe d’Odessa. Le point avec Omondo News.

Deux accords ont finalement été passés pour faire sortir les céréales d'Ukraine. Le premier avec la Russie sous la direction des Nations Unies et le second avec la Turquie. Une nouvelle qui aurait pu mettre fin aux inquiétudes sur les risques de famine dans certains pays africains.
Car, après le bombardement russe du port d'Odessa samedi, l'accord conclu vendredi entre l'Ukraine et la Russie prévoyant des couloirs sécurisés pour exporter par la mer Noire des millions de tonnes de céréales ukrainiennes est désormais fragilisé. Sans réagir directement, Moscou a nié toute implication dans ces frappes auprès d'Ankara.

Le grand port d'Odessa est crucial pour la reprise des exportations de céréales ukrainiennes.

Avant l'annonce des tirs de missiles sur Odessa, l'Union africaine s'était « félicitée » samedi de l'accord sur les exportations de céréales, saluant un événement « bienvenu » pour le continent qui fait face à un risque accru de famine. Selon l'organisation panafricaine, cet accord était « une réponse » à la visite en juin en Russie du chef de l'État sénégalais Macky Sall, président en exercice de l'UA ( Union Africaine ) et du président de la commission de l'UA, le Tchadien Moussa Faki Mahamat, qui avaient souligné auprès de Vladimir Poutine « l'urgence du retour des céréales d'Ukraine et de Russie sur les marchés mondiaux ».

Dans un tweet, Macky Sall a aussi félicité les présidents turc Recep Tayyip Erdogan, qui a accueilli les discussions à Istanbul, Russe Vladimir Poutine et Ukrainien, Volodymyr Zelensky pour cet accord.
« C'était l'objectif de la mission que j'avais conduite à Sotchi le 3 juin dernier », a-t-il affirmé. Cependant pour le président Sud-Africain, c'est aussi un cri d'alerte qui devrait inciter l'Afrique à devenir autonome dans la production de céréales et d'engrais. Par conséquent, pour de nombreux experts et analystes, ces accords, trop fragiles, ne sont pas à même de mettre fin à la crise alimentaire que traverse le continent africain ces dernières années.

« Signal d'alarme ».

« Voulons-nous continuer pendant des années à dépendre de cette partie du monde pour nos céréales et nos engrais ? » s'est interrogé le Chef de l'État lors d'une conférence de presse à Pretoria à l'occasion d'une visite officielle du président ivoirien Alassane Ouattara. « Ou devrions-nous dire que ce conflit est un signal d'alarme comme le Covid est devenu un signal d'alarme pour beaucoup d'entre nous sur le continent africain pour commencer à produire nos propres vaccins ? » a-t-il poursuivi, insistant sur le fait que les pays africains doivent accélérer leur production agroalimentaire afin de réduire les importations.

Toutefois, il faut rappeler que les prix des aliments sur le continent Africain sont en hausse à cause de la guerre Russe en Ukraine, deux pays qui assurent notamment 30 % des exportations mondiales de blé. Des millions de tonnes de grain sont bloquées dans des ports ukrainiens par la présence de navires de guerre russes et celle de mines, placées par Kiev pour défendre ses côtes.

L'inflation et les pénuries viennent s'ajouter aux conflits et aux sécheresses dévastatrices qui frappent déjà le continent le plus desenclavé du monde.

S'exprimant aux côtés du président Ramaphosa, Alassane Ouattara a affirmé avoir téléphoné en début de semaine au président ukrainien Volodymyr Zelensky, à propos de la reprise des exportations.
« J'ai indiqué au président Zelensky que je souhaite que l'approvisionnement se fasse en priorité vers le continent africain en raison des économies et de la situation sociale dans beaucoup de pays », a-t-il dit.

L'accord signé le 22 juillet doit permettre d'exporter entre 20 et 25 millions de tonnes de grain bloquées en Ukraine.

Crise humanitaire.

L'ONG International Rescue Commitee (IRC) avait par ailleurs salué une « première étape vers l'atténuation de la crise alimentaire mondiale ». La hausse des cours est venue aggraver la situation des pays déjà confrontés à une crise alimentaire, notamment dans la Corne de l'Afrique (Kenya, Éthiopie, Somalie, Djibouti), qui connaît sa pire sécheresse depuis 40 ans. « La levée de ces blocus contribuera dans une certaine mesure à atténuer la faim extrême à laquelle sont confrontées plus de 18 millions de personnes en Afrique de l'Est, dont 3 millions sont déjà confrontées à des conditions de faim catastrophiques », a notamment souligné le directeur des urgences de l'organisation pour l'Afrique de l'Est, Shashwat Saraf, dans un communiqué.

« La prochaine étape importante doit consister à financer intégralement la réponse humanitaire dans la région, afin d'éviter les pires effets de la sécheresse et d'empêcher qu'une famine catastrophique sans précédente n'engloutisse complètement la région d'ici à la fin de l'été », a-t-il confirmé.

Rosine MANGA