Société

Omondo Série: « l’Eté des Amours, des passions et des libertés ». Acte 2

Omondo Série: « l’Eté des Amours, des passions  et des libertés ».  Acte 2

Il était  beau comme un Dieu, mais dingue : ivre d’amour, de sexe et de vie.


Sonia ne parlera plus jamais de cet été 2021 à Paris. Il a pourri sa vie et ses désirs d'amour et d'affection. Elle se demande si après avoir connu McHale, on pourrait encore croire à l'amour ?

Voici son histoire. Je n’en suis toujours pas remise.

Mon témoignage d'été est une histoire dingue, secrète ; je n'aime pas en parler, pour tout dire.
J'avais à peine 20 ans et lui 29. Je n'étais pas du tout prête aux grands frissons de la passion et de l'amour. J'étais une fille plutôt réservée, mais folle de livres et la plupart du temps, je vivais un peu par procuration, parce que je n'osais pas affronter la dureté de la vie et ses vicissitudes. Puis un jour, c'est la vie qui est venue vers moi, je veux dire qu'un garçon est venu me sortir de ma réserve naturelle et m'entraîner dans les tumultes de la vie et des passions.

Il s'appelait McHale. Il était beau et sculpté comme un Chippendale ; j'en tombais folle amoureuse. Il venait de Bâton-Rouge, en Louisiane, au sud des États-Unis. Nouveau en France, il semblait avoir besoin d'être soutenu pour son séjour linguistique ; du moins c'est ce qu'il me dit quand il m'aborda. Il se rendait  souvent à la Médiathèque Longchamp de Neuilly-sur-Seine, c'est là que je le croisai pour la première fois. Il vint me demander si je pouvais lui conseiller une lecture pour son séjour à Paris. Il voulait en apprendre un peu plus sur les Français et leur passé, leur style de vie et "leurs petits trucs". Nous nous mîmes à sourire comme de vieilles connaissances sur cette expression "petits trucs". Et comme le sourire débouche les peurs, je me rapprochai de McHale, et sans trop savoir comment, je me sentis tout de suite à l'aise avec lui. C'est donc tout naturellement que je le suivis quand il m'invita au Séquoia, un café très tendance , rue Charles De gaulle à Neuilly.

Pour l'amitié et pour le rire

Nous nous retrouvâmes pour la deuxième fois à la médiathèque. Je dois avouer que je tombais déjà amoureuse de ce garçon un peu fou et sans prétention, qui ne se prenait pas au sérieux, comme la plupart des fils de riches que je côtoyais à la fac. Il semblait si naturel et si facile à vivre. Je me demandais même s'il ne me martyrisait pas un peu, puisque nous nous revîmes deux fois sans qu'il me drague et ne me parle ni d'amour ni de sentiments. Je finis par conclure qu'il devait être un de ces garçons blasés par la vie et les aventures, tellement il était beau et ouvert à la vie. Il avait ce truc un peu rare et bizarre qui vous fait penser qu'il était le "bon" et qu'il ne fallait rien lui refuser, au risque de perdre l'occasion unique que Dieu ne vous offrirait plus jamais.

 Je m'accrochais donc à lui. Je lui téléphonais une fois voire trois fois par jour, histoire d’avoir de ses nouvelles ; il répondait, nous riions, sans peur des lendemains, sans contraintes, puis je raccrochais, sans avoir ces mots tendres que j'attendais de lui. Mais nous étions déjà si liés, si complices par le verbe.

La Dépendance survint très vite

Puis, je compris que je ne pouvais plus me passer de McHale. Alors, je me dis : "Pour une fois, secoue-toi ma belle, dis-lui ce que tu penses de lui. Il est si prévenant, et que risques-tu à la fin ?"

C'était un mercredi après-midi. Je pris mon téléphone et je l'appelai. C'était bizarre, cette fois je tremblais de peur. Je n'osais pas croire que j'allais faire ma déclaration à un homme. Moi qui fuyais les garçons les plus entreprenants de mon lycée, j'allais faire la cour à un homme et l'inviter à passer une soirée, ou quelque chose dans ce genre. Comme je tremblais de peur ! Je raccrochais le téléphone, je sentis une sorte de chape sur ma tête, comme si elle allait exploser. La peur de tout foutre en l'air et de le regretter plus tard. Une partie de moi me conspuait : "Et s'il ne voulait pas de toi ? Pour lui, tu n'es qu'une amie de bibliothèque. Qu'est-ce qu'un beau jeune homme, avenant et très ouvert d'esprit viendrait faire avec une gourde comme toi ?"

 Une autre partie de moi, plus faible, moins affirmée me redonnait l'espoir en me disant, comme une amie : "Qu'est-ce que tu as à perdre ! Invite-le Sonia, et tu verras bien." Je naviguais entre deux eaux, je m'embourbais, et le train de l'été filait, défilait, avec ses envies de liberté, de folie et d'aventures. Je n'arrivais pas à m'agripper. Je finis par être convaincue que McHale ne pouvait pas avoir envie de moi. Que nos rencontres relevaient de la pure fantaisie de la vie parisienne et de la politesse entre inconnus bien élevés. Prise de panique et de désespoir, je pleurais sur mon sort. J'avais bien 20 ans et je n'avais pas encore  connu les folles étreintes des soirées passées sous le vent, quand un homme fait de vous sa priorité. Qui devrais-je blâmer, puisque je n'avais cessé, depuis le collège, de repousser tous les garçons qui se montraient un peu trop insistants ? Me voilà coincée et prise au piège. Moi qui attendais le garçon, le seul, le vrai à qui je devrais offrir ma vie, mes rêves, ma virginité.

Le Coup de Folie

Ce jour-là, vendredi, je ne raccrochai pas mon téléphone. J'étais décidée à renverser le cours d'une vie par trop monacale. Je devais parler à McHale et même lui dire qu'il me plaisait. Je me doutais qu'il devait le savoir. Je composai son numéro, le cœur battant la chamade. C'était comme si c'était la première fois que je parlais à McHale. Il décrocha avec la même facilité et le même allant : "Alors ça va Sonia ?" Puis il me dit : "Dis-moi tout."

Cette invitation me bloqua presque, mais je surmontai mes peurs. "Je voulais te dire que je veux que nous nous voyions ce soir chez moi." Comme il ne disait rien, je continuai sans hésitation : "Es-tu libre ?" Il prit une seconde, un vide s'établit entre lui et moi. Je n'entendis que le froissement des feuilles de son agenda, puis il répondit : "Ça tombe bien, je n'ai pas de clientes ce soir. Je te réserve donc ma soirée !" Puis il me fit : "C'est bien au 20, prés de la paroisse Saint-Pierre de Neuilly  ? Bien entendu. À ce soir !"

Il était ponctuel. Il sonna et la porte s'ouvrit devant lui. Il était encore plus beau que d'habitude. Il me dit : "Je me suis fait beau pour toi." Je ne croyais pas mes yeux ni mes oreilles. McHale, au teint hâlé et délicat, s'était apprêté pour moi. Je l'entraînais dans ma chambre d'ado, au pavillon des enfants où ma mère ne devrait presque jamais venir. Il me fit l'amour comme un dieu. Je me rendis compte que je ne m'y connaissais pas. Je ne souffris pas. Il était si délicat, et ma première fois ne fut pas une débâcle ni une scène de torture, comme ma cousine Annabelle me le disait souvent : "Tu verras, ça fait très mal." Je n'eus presque pas mal, au contraire. Je passais le plus beau moment de folie et de désirs que je ne pouvais soupçonner. Puis, à minuit trente, il me dit : "Il faut que j'y aille, j'ai rendez-vous dans une heure à la Porte Maillot. Cette fois c'est gratuit, je ne me fais pas toujours payer par des amies et surtout que cest la première fois ; mais il faut que je parte, je dois bien gagner ma vie."

Puis avant de sortir, il me remit une carte "Hello Chick, Lover Boys". Je compris, c'était un professionnel, c'était un escort boy. Il venait de s'occuper de moi, il ne m'avait pas aimée, il s'était « occupé de moi ». Si bien et si gentiment. Il me fit promettre de payer la prochaine fois, si j'avais besoin de ses services. Je voulais le retenir pour discuter, mais il se retourna vers moi et me dit à l'oreille : "Ne t'inquiète pas, tu seras toujours ma priorité. Je ne suis pas sûr de vouloir ton argent. Je ferai de toi ma priorité.»Il claqua doucement la porte. J'ouvris pour le suivre, puis j'entendis, avec  effarement : "Mc, salut ! Mais McHale, que fais-tu chez moi ?" Il lui répondit sans cérémonie : "Je me disais bien que je suis déjà venu ici, un soir. Ce lieu ne m'avait pas paru étranger. Au revoir Madame Valentin, à un de ces jours."

Il connaissait ma mère, et il était déjà venu dans notre maison, pour les besoins de son travail. Je reculai  prudemment sur mes pas, je refermai la porte, et je me jetai brutalement sur le lit, qui venait d'accueillir McHale et moi. Je le détestais et je criai au secours : "Il faut que quelqu'un m'aide ! Dites-moi que je rêve. " . Lui était parti...Je l’appelai une fois, deux fois, et il finit par décrocher. Je lui posai la lancinante question : «  Tu es déjà venu pour ma mère ? Dis -moi la vérité ; tu me la dois , Mc Hale ! Tu sais qu’elle est fragile, elle a perdu son mari, il ya 5 ans. Tu en as profité ! » . Après m’avoir religieusement  écoutée,  il finit par me dire : "Je préfère venir pour ta mère, c'est une bonne adresse et une bonne cliente. Nous pourrions rester amis, de bons amis, comme avant, quand nous parlions de tout et de rien, sans engagement réciproque, à la bibliothèque."

 Qu’en savait-il , quel  l’idiot ! Avec lui je parlais de moi, de ma vie et de ce que je voulais devenir, de mes projets avec lui, de notre future vie commune. J'allais me rendre compte qu'un escort boy ne rêve plus, il butine comme un papillon et cela lui suffit ; il n'a pas le temps de s'attarder sur de broutilles et les sentiments d’une bégueule de 20 ans. Car, pour lui, le temps, c'est de l'argent ! Je pleurais tout mon soûl. Et j'en pleure encore.
Ce n'est pas comme ça que j'envisageais ma première fois. Je ne savais pas s'il fallait le rappeler, le détester ou oser l'aimer. Mais un chippendale  est-il disposé pour l'amour ? Le vrai ?

Sonia Valentin, Neuilly-sur-Seine, Paris.