La nouvelle loi géorgienne sur "l'influence étrangère" suscite l'indignation de la société civile. En imposant l'enregistrement des organisations recevant plus de 20% de financements étrangers comme "poursuivant les intérêts d'une puissance étrangère", le texte vise clairement à réduire au silence les voix critiques.
"Nous allons devoir arrêter de travailler"
"C'est au tour de la société civile d'être ciblée", dénonce Baia Pataraia, directrice de l'ONG féministe Sapari. Son organisation, qui prodigue 2000 consultations juridiques par an à des femmes victimes de violences, est presque intégralement financée par des bailleurs occidentaux, comme la plupart des grandes associations géorgiennes. "Pour le moment, nous tentons de résister, mais il ne reste plus beaucoup de temps. Quand la loi entrera en vigueur, nous devrons tenir jusqu'aux élections pour exprimer notre voix", prévient-elle, subissant déjà les représailles avec des tags injurieux sur son immeuble.
Un "mépris flagrant de l'État de droit"
Pour Gouram Imnadze, du Social Justice Center, "nous allons devoir arrêter de travailler" si la loi est appliquée. Il dénonce "un mépris flagrant de l'État de droit" de la part du gouvernement du Rêve géorgien, qui accuse désormais ouvertement les ONG de "saper les institutions" et de vouloir fomenter une "révolution".Le parti au pouvoir ne cache plus ses intentions de réduire au silence la société civile, sur fond de rapprochement avec Moscou. Une dérive antidémocratique que les médias indépendants comme Publika entendent également combattre.
La presse indépendante aussi menacée
"Les revenus publicitaires sont peu développés en Géorgie, les médias indépendants doivent recevoir des financements extérieurs pour exister", explique la rédactrice en chef Lika Zakachvili.Son média, financé à 90% par des fondations internationales, sera durement touché par le nouveau texte qui prévoit que le ministère de la Justice pourra exiger les données personnelles de tous les membres et bénéficiaires des "agents de l'étranger". En imposant la transparence sous peine de lourdes sanctions, le gouvernement géorgien cherche clairement à faire taire ONG et médias critiques. Un coup de force antidémocratique dénoncé par une société civile qui entend résister jusqu'aux prochaines élections législatives d'octobre 2024.