Société

Egypte: la famille Simonian au coeur de l'enquête qui éclabousse le Louvre

Egypte: la famille Simonian au coeur de l'enquête qui éclabousse le Louvre

Les policiers s’intéressent au rôle central qu’auraient joué ces marchands d’art dans l’affaire pour laquelle l’ancien patron du Louvre Abu Dhabi, Jean-Luc Martinez, a été mis en examen.

 

Dans l’enquête sur le trafic d’antiquités égyptiennes qui, le 25 mai, a abouti à une mise en examen de Jean-Luc Martinez, l’ancien président du Louvre Abu Dhabi, une famille apparaît, avec un rôle capital, celui de pourvoyeur. Les Simonians, des marchands d’art qui opèrent dans un immeuble cossu de l’Oberstrasse, une rue calme et bordée d’arbres dans un quartier résidentiel de Hambourg, en Allemagne. Ils seraient ceux par qui le scandale commence, selon les éléments – notes de synthèse et procès-verbaux d’audiences – établis par des enquêteurs français et consultés par Le monde. Les forces de l’ordre interviennent dans le cadre d’une enquête ouverte en 2018 et dirigée par le juge Jean-Michel Gentil. Sans les Simoniens, pas de pièces à éparpiller. Sans eux, pas de ventes.

Aucun membre de cette famille n’a encore été entendu par la justice. Des mandats d’arrêt européens ont pourtant été émis en septembre 2020 contre trois membres de cette famille résidant en Allemagne et leurs domiciles ont été perquisitionnés en août de la même année. « Nous ne les avons pas extradés pour deux raisons, dont une familiale, car certains ont de jeunes enfants. L’autre selon le principe Non bis in idem, qui ne permet pas d’être jugé deux fois pour la même chose. Il faut terminer les investigations en Allemagne, ce qui serait impossible s’ils étaient envoyés en France. »précise une porte-parole du procureur de Hambourg, rappelant « que ces trois personnes n’ont pas encore été entendues par la justice allemande ».

Simon Simonian, Hagop et Serop, ses deux frères, gardent une grande part de leur mystère aux yeux des policiers de l’Office central de lutte contre le trafic des biens culturels (OCBC). Ces derniers, en croisant leurs informations au fil des auditions et gardes à vue ainsi que des mails utilisés par leurs homologues américains, commencent pourtant à identifier, en l’absence de personnalités encore floues, une méthode. Il en faut pour acheter des pièces majeures des musées les plus prestigieux du monde.

Déjà, le métropolite de New York (Met) a dû convenir que le sarcophage du prêtre Nedjemankh, acheté en 2017, n’aurait pas dû quitter l’Égypte et l’a renvoyé au Caire, en 2019. Cinq autres œuvres de même provenance ont été saisies le 1euh Juin. Le Louvre Abu Dhabi, qui a acquis sept pièces par ce même canal, devra peut-être aussi s’en séparer.

Sur le radar depuis 2013

Décédé en 2020 aux Etats-Unis, Simon Simonian aurait été, selon les mots Monde de Matthew Bogdanos, procureur adjoint du district de Manhattan, «  le cerveau du cas. Son frère Serop, né au Caire, en 1942, et naturalisé allemand, qui dirige officiellement une société de numismatique, Dionysos Coins and Antiquities – injoignable par son numéro de téléphone -, aurait la haute main sur le marché européen, d’après les enquêteurs. Le marchand, qui aime qu’on lui donne « Monsieur le docteur », contiendrait pas moins de 25 000 antiquités entreposées en Europe et au Moyen-Orient. Le 28 juillet 2020, l’OCBC a souligné, comme on peut le lire dans les actes, « l’importance de sa position dans le trafic international des antiquités qui dure depuis de nombreuses années » et a suggéré de réexaminer toutes les données le concernant. Contacté par mail, Serop Simonian n’a pas répondu à notre demande d’interview, affirme Le monde.

Cette grande famille de marchands d'oeuvres d'arts serait la pourvoyeuse dans le cadre de cette enquête sur le trafic d'antiquités égyptiennes qui a valu au président du Louvre Abu Dhabi, Jean-Luc Martinez d'être mis en examen. Les membres de cette famille selon la police sont ceux par qui le scandale a commencé. Pour l'heure aucun d'entre eux n' a encore été auditionné bien qu'ils soient trois à faire l'objet de mandats d'arrêts européens lancés en septembre 2020. Sans cette famille basée en Allemagne il n'y aurait pas eu de ventes et aucune pièce n'aurait été dispersé.

Denise KAVIRA KYALWAHI