Si besoin était encore, cette coupe d'Afrique des nations de football 2021 aura révélé aux Africains, ce que la France pense d'eux.
Il faut le dire clairement, les pays européens après les pauses forcées de leurs compétitions sportives, notamment les championnats locaux de football, pause due au covid, veulent à tout prix rattraper les pertes financières occasionnées par cette pandémie. Alors, ces pays européens n'ont pas voulu d'une CAN en ce début d'année 2022 parce que le spectacle chez eux se trouverait affaibli du fait de la vacance des footballeurs africains qui y font l'essentiel du travail.
l'Angleterre s'est exprimée de manière claire et précise contre cette compétition, la France par contre, comme à son habitude est passée par les basses manoeuvres. Après de nombreuses tractations, devant la détermination de Samuel Eto'o, nouvellement porté à la tête de la Fédération Camerounaise de Football, à voir cette compétition se joué à la date prévue dans son pays, en fin d'année 2020, les journaux français se sont comme par enchantement rappelés que Samuel Eto'o devait au fisc espagnol une grosse somme d'argent, d'autres ont même évoqué l'hypothèse d'une peine de prison à son endroit. Ce n'était que le début de ce qui sera appelé tout au long de cette compétition, le "Cameroun bashing". La moindre information scabreuse, vérifiée ou pas, fondée ou pas était tout de suite relayée par la presse française.
Entre les pelouses défectueuses, les tests de covid douteux, les conférences de presse sans micros, le climat et ces pauvres comoriens victimes selon la presse française d'une collusion entre le Cameroun et la caf, l'on a eu droit à tout de la part de la presse française pour démontrer aux yeux du monde que l'organisation de cette CAN était un fiasco, donc une erreur. Mais quand on parle des yeux du monde, de quel monde s'agit-il au juste? A peine celui du nombril de la France, car seuls les français croient encore que leur pays est une grande nation écoutée par tous.
C'est justement ce que la France doit à l'Afrique. Pas d'avoir libéré Paris des Nazis, pas de lui fournir l'uranium gratuitement pour s'éclairer, pas de lui fournir le pétrole gratuitement, pas d'être une terre bénie pour ses entreprises, pas de lui laisser l'opportunité de contrôler sa monnaie, donc son économie, pas de lui laisser dicter sa loi à ses présidents, non.
Ce que la France doit à l'Afrique, c'est sa crédibilité. Il n'y a qu'en Afrique que l'on peut juger crédibles les menaces de la France contre la Russie, il n'y a qu'en Afrique que l'on peut juger crédibles les sanctions de la France contre Barshar Al-Assad ou Kim Jong Un ou encore Recep Tayyip Erdogan, il n'y a qu'en Afrique que l'on peut juger crédibles les récriminations de la France devant l'Australie quand les États-Unis lui soufflent un marché, il n'y a qu'en Afrique que l'on peut juger crédible la position de la France dans le conflit israélo-palestinien, il n'y a qu'en Afrique que l'on peut juger crédible que RT soit plus contrôlé par la Russie que RFI ou TV5 par la France, il n'y a qu'en Afrique que l'on peut juger crédible la force militaire française, il n'y a qu'en Afrique que l'on peut juger crédible la lutte de la France contre le terrorisme, il n'y a qu'en Afrique que la Francophonie est crédible comme organisation, il n'y a qu'en Afrique que le français est crédible comme langue internationale, il n'y a qu'en Afrique que l'idée de la France grande nation est encore crédible.
Mais à force de trop tirer sur une corde elle finit par rompre. Si besoin était encore, maliens, burkinabè, nigériens, sénégalais, ivoiriens, gabonais, tchadiens, congolais, camerounais, savent désormais dans l'ordre des priorités, quelle est la place de leur épanouissement aux yeux de la France.
Comme le Cameroun aujourd'hui, ces pays ont fait l'amère expérience du "bashing" à la française. Un traitement que ce pays réserve à ceux qui lui font vraiment peur et qui n'ont pas d'intérêts communs avec elle, la Russie, la Turquie, la Chine, l'Afghanistan, la Syrie, la Corée du Nord... Seuls les pays africains ignoraient que la France avait autant peur d'eux que les autres pays sus-cités et qu'elle n'a jamais eu d'intérêts communs avec eux.
Loris-Clet ADIANG